Cartierville… 100 ans déjà et ça continue !
Bonne année à tous! Je vous souhaite de la santé dans vos affaires et de la prospérité dans votre cœur! 2006, j’espère vous apportera satisfaction et bonheur. Cette année sera très spéciale pour un quartier montréalais. En effet, Cartierville aura 100 ans. Je me propose de vous dévoiler dans les quelques lignes suivantes un bref regard sur son histoire.
Jusqu’en 1906, le territoire qui allait devenir Cartierville faisait parti du village de Saint-Laurent. Dans les années 1720 les premiers colons s’installent. Si on se fit à la tendance à l’époque, la population qui y résident sont des agriculteurs ou bien représentative d’un milieu rural propre au régime seigneurial qui prévalait. Lors du premier tiers du 19e siècle, la configuration se modifie. La proximité avec l’île Jésus, i.e. Laval, et de la rivière des Prairies, favorisera le voyagement des biens et des personnes. De nombreuses activités liées au commerce prennent naissance. D’ailleurs en ce début de 19e siècle, il y existait un système de traverse pour franchir la rivière se rendant à Laval au village de l’Abord à Plouffe. Peu à peu, la population de ce qui allait devenir Cartierville se distinguait du reste du village de Saint-Laurent qui demeurait axé sur l’agriculture. Le chemin du bord l’eau, aussi appelé le chemin de la reine qui est aujourd’hui le boulevard Gouin voit apparaître diverses activités économiques : hôtels, magasins généraux, boucheries, bureaux de notaires et d’avocats, etc. Ailleurs sur le territoire, une autre activité prend de l’ampleur : celle de tailleur de pierre. Les cultivateurs occupaient toujours une place importante mais toujours diminuant au fil des années. En 1836, Paschal dit Persillier Lachapelle père obtient un droit de construire un pont reliant le village Saint-Laurent et l’Abord à Plouffe. L’année suivante, il tenta d’incendier son pont! Est-ce qu’il devint fou ? Mais non, il était un des meneurs des patriotes de Saint-Laurent. Devant l’avancé des troupes britanniques qui mettaient tout à feu et à sang, il voulut les stopper. Cependant, il n’a pas réussi son dessein. À cette époque ce pont était appelé le pont de l’Abord à Plouffe. Aujourd’hui, il porte le nom de son constructeur Lachapelle.
Dans le dernier tiers du 19e siècle, à Montréal la population est toujours grandissante. L’hygiène publique laisse à désirer, il n’y aura de collectes de déchets qu’au début du 20e siècle. Plusieurs épidémies frappent le Québec comme la grippe espagnole, la petite vérole et bien d’autres. L’atmosphère est viciée en ville. Tandis qu’au nord de l’île, l’urbanisation et le développement sauvage n’a pas encore eu le temps de détruire les beaux paysages bucoliques. Plusieurs personnes s’achèteront des propriétés pour y passer des vacances dans le bon air et les espaces verts. Cependant, les charmes de cette région montréalaise est accessibles seulement à ceux qui ont les moyens d’avoir une propriété et une voiture pour s’y rendre. Donc des gens relativement aisés. L’arrivée du tramway changera tout et démocratisera l’accès aux espaces verts, à villégiature et à la baignade dans la rivière des Prairies… c’est toujours gratuit aujourd’hui!
Apparition de trottoirs de bois en 1890 sur le boulevard Gouin. Leur entretient incombait aux citoyens sous peine d’amendes.
En 1895 le tramway arrive à Cartierville avec la construction du terminus au coin Gouin et Grenet. Plusieurs se souviendront du tramway # 17 qui était peint de couleur orange pour être plus visible!
Plus que le 20e siècle approche plus la population est distincte par rapport au reste du village de Saint-Laurent. Peu à peu, certains contribuables se plaideront de payer des taxes pour des services qu’ils n’utilisent pas et déploreront un manque de service face à leurs besoins particuliers à eux et toujours croissant.
Premier service (desserte) dans l’agglomération en 1904. Le père Rhéault de la congrégation Sainte-Croix vint dire la messe pendant quatre ans dans des locaux de fortune, tantôt une résidence, tantôt une classe d’école.
Toujours en 1904, une autre institution dans Cartierville naît : le « boating club » de Cartierville cofondé par l’écossais Hugh Paton le même qui acheta une île qui portera le même nom. Des olympiens y ont été formés comme les médaillés olympiques Lucie Guay et Alwyn Morris.
En 1905 une première chapelle est construite au coût de 3000$. Sur un terrain offert par Gaspard De Serres (aujourd’hui rue De Serres).
Le 7 octobre 1905, un avis public est affiché à la sortie de l’église de la paroisse Saint-Laurent, au magasin « Crevier et frères » et aux abords du chemin public (boulevard Gouin) dans la partie connue sous le nom de « Cartierville » Cet avis faisait état du dit projet de l’érection d’une nouvelle municipalité. Tous étaient conviés à venir à une audience sur ce projet. Un groupe de cultivateurs ne croyaient pas que leur intérêts seraient bien servis dans une municipalité ou leur profession est sous représentée… Du moins, ils suggèrent une modification au territoire projeté. On leur répond : Les cultivateurs de la paroisse Saint-Laurent ayant des terres aboutissant à la rivière des Prairies ont presque tous vendus leurs terres à des citadins à prix élevés. Ces citadins exigent de bons chemins et des trottoirs à grands cris qu’ils ne peuvent obtenir de la municipalité de paroisse de Saint-Laurent. Tandis que les représentants de Saint-Laurent s’opposent à ce projet prétextant qu’ils perdraient accès au pont de l’Abord à Plouffe.
Il sera résolu que le territoire projeté devra être modifié. La partie sud ne sera pas comprise dans la future municipalité. Puisque la plupart des terres sont à vocation agricole. Le futur territoire compte 143 maisons dont 105 sont habités, puis 35 sont des maisons de campagnes donc habités en été seulement par des citadins. La superficie est d’environ 1150 arpents.
En 1906, une partie du village de Saint-Laurent fait sécession menant à la création de la municipalité de village de Cartierville. Le vocable « Cartierville » fut choisi en l’honneur de Georges-Étienne Cartier (1814-1873).
Suite à l’élection des conseillers municipaux, leur premier but est de désigner un maire. Ils choisiront Félix Plouffe, marchand de bois. Lors de l’assemblée du 7 mai 1906, Plouffe demande d’être démis de ses fonctions en raison de ses occupations. L’assemblée refuse sa demande puisque la municipalité avait besoin plus que jamais d’homme honnête et intègre comme lui. Plouffe sera condamné à être maire de Cartierville de 1906 à 1909! Lui succèdera à titre de maire : Avila Crevier en 1909, L. Ovide Grothé en 1911.
En 1908, premier aqueduc et éclairage des rues.
À l’époque où la nouvelle municipalité de Cartierville à des appétits annexionnistes cependant une partie de son territoire se détache afin de devenir le village de Saraguay. Cette partie de territoire était contrastant du reste de Cartierville puisque étant rurale et agricole. Ceci est sans rappeler l’opposition de certains cultivateurs à la création de Cartierville en 1906 lors du détachement de Saint-Laurent. Saraguay est un regroupement de maisons d’été et de fermes. En 1964, le sort de la municipalité de Saraguay est soumis à un référendum ayant pour objet l’annexion à la ville de Montréal ou à la ville de Saint-Laurent. Le 25 février 1964, les résidants s’expriment : Montréal l’emporte avec 56 votes contre 39 pour Saint-Laurent. Les « Barons du Golden Square Mile » établissent des maisons d’été et des fermes à Saraguay au début du 20e siècle. Malgré que ces « barons » aillent gérés ce territoire comme un fief féodal, ils le protégeront d’un développement urbain « sauvage ». Le vocable « Saraguay » provient d’un mélange de français et d’amérindien signifiant : « la route des cageux » ou « chemin des flotteurs ».
Rattachement de la municipalité de village de Cartierville à la ville de Montréal en 1916. À ce moment, Cartierville comptait une population de 905 personnes. L’aventure aura durée 10 ans. Comme bien des municipalités situées le long de la rivière des Prairies, Cartierville se fera avaler par la ville Montréal dans un contexte particulier : ces municipalités se sont donné des infrastructures (aqueduc, trottoirs, routes, etc.) en s’endettant lourdement. À l’époque, Montréal voulaient acquérir ses territoires afin de s’assurer un développement rationnel et harmonieux. Plusieurs croient que ces municipalités se sont donné toutes sortes infrastructures avant de se faire annexer. Puis ainsi « swinger » la facture à la ville de Montréal!
1923, ouverture de parc d’attraction, « le Parc Belmont ». Fermeture du parc en 1983. Pendant près de 60 ans, le parc Belmont a constitué une attraction touristique majeure pour Montréal. Les manèges tels que le « scénique », le « rotor » et le « rapido » procureront toutes sortes de sensations fortes; des événements culturels mettant en vedettes des artistes comme Oscar Peterson, le cirque « Barnum and Bailey », les lutteurs Yvon Robert et Larry Moquin, Marcel Giguère, Michel Noël alias le capitaine Bonhomme, Claude Blanchard ; et la grosse madame riant à l’entrée de la maison hantée. J.-Roméo Gauvreau devient propriétaire du parc… monsieur Gauvreau s’était illustré comme dirigeant du défunt club de baseball, les Royaux de Montréal : il était l’un des responsables de l’embauche du premier joueur de race noire (Jackie Robinson) dans le baseball professionnel en 1945. Autre détail pouvant intéresser les curieux, Pierre-Elliot Trudeau détenait une part d’action, grâce à son père, par conséquent il siégeait sur le conseil d’administration du parc Belmont de 1956 à 1961. Le père de l’ancien premier ministre Pierre-Elliot Trudeau, Charles, a déjà été l’un des propriétaires du parc Belmont vers les années 30. Le parc d’attractions a souvent changé de mains, mais le propriétaire le plus stable a été la famille Gauvreau, qui en a eu la propriété pendant plus de quarante ans. Le parc Belmont employait environ 500 étudiants à chaque été.
De 1924 à 1925 est la période de construction de l’hôpital Sacré Cœur pour remplacer l’auspice de Notre Dame de Grâce, administré par les sœurs de la Providence, incendié le 15 mars 1923. Les religieuses décident de construire un nouvel hôpital et d’acquérir à cette fin le vaste terrain de la ferme Gohier-Lapierre à Cartierville, qui s’étendait du boulevard Gouin jusqu’à la ligne de chemin de fer de Val-Royal. Le contrat d’achat (140 000 $) est signé le 1er août 1923. Inauguration de l’hôpital du Sacré-Cœur. Le docteur Norman Bethune y a œuvré de 1933 à 1936. Champs d’interventions principales de la tuberculose et l’orthopédie. Devient hôpital général en 1955. C’est aussi en 1973 que l’Hôpital ajoute un fleuron prestigieux à sa gamme de services en se fusionnant avec l’Institut Albert-Prévost, qui devient son département de psychiatrie. Fondée en 1919 par le docteur Albert Prévost, cette institution d’avant- garde qui avait marqué profondément l’évolution de la psychiatrie au Québec recevait alors pour des stages de formation la majorité des résidents dans cette spécialité.
Cette chronique a été possible grâce à la précieuse collaboration de personnes extraordinaires. Alors je remercie : Robert Laurin, Ginette Vallée, Yves Gaudreau, Steve Proulx, à la paroisse Notre-Dame-des-Anges, musée McCord, archives de la ville Montréal, archives nationales du Québec et biens d’autres.